Sorti le 11 novembre, Punk Wars, c’est le premier né du tout jeune studio de développement polonais Strategy Forge, propulsé dans nos petites mimines par Jujubee (qui a commis COVID : The Outbreak…). On est loin d’un triple A, avec un gameplay lourd et aux stratégies profondes, mais il n’est pas impossible que vous vous amusiez quand même !
Punk Wars Le concept
Sommaire
De base, j’affectionne le post-apo et là, vous boufferez du sable ! Pas un brin d’herbe, pas un arbre à l’horizon, tout juste quelques flaques d’eau croupie et des ruines bientôt englouties par la caillasse. Ce qui est pratique avec l’apocalypse, c’est qu’elle laisse un grand vide pour déployer son petit lore perso. Comme de bien entendu, la dévastation du monde n’a pas rendu l’humanité plus sage et les survivants se tapent sur la gueule. Sinon à quoi on jouerait, hmm ?
Vous pourrez donc prendre en main ou vous confronter à quatre factions : les Steampunk, qui tournent à la vapeur (oh ?), les Steelpunk, qui forgent l’acier, les Atompunk qui jouent avec de l’uranium et les Dieselpunk (je vous laisse deviner), auxquels s’ajoutent les Wastelanders (« fricheurs » en français) qui hantent les ruines que vous ne manquerez pas de croiser, ainsi que d’éventuels rebelles dans vos propre troupes. Ça fait du monde pour vous briser les noix.
Petit point lexique (ici on aime les mots et tout le mal qu’on leur fait) : le steampunk et le dieselpunk qualifient habituellement des uchronies dans lesquelles l’humanité a préféré utiliser massivement l’une ou l’autre des ressources que sont la vapeur et le pétrole, avec une exploration conceptuelle, esthétique et idéologique tranchée et jubilatoire. On a toustes en tête l’image de ces villes fourmillantes, verticales, aux teintes de laiton et über-industrialisées popularisées par le cinéma et la littérature, où les gens portent des jaquettes à col serré et des bottes militaires à tige haute très seyantes, dans un retro-futur victorien badigeonné d’art nouveau. Le capitalisme a aussi produit de jolies choses, je dis pas. Bref, Punk Wars tète cette mamelle-là, sauf que c’est pas retro-futuriste, c’est futuriste tout court et les villes moches de notre triste réalité se sont cassé la gueule. Va falloir reconstruire, mais en mieux : en punk.
Bienvenue dans Punk Wars.
Le prologue et le didacticiel
Le Prologue comme le jeu complet offrent un didacticiel anecdotique : vous passerez en revue les commandes de base (les bâtiments qui produisent des ressources et le maniement des premières unités) et puis basta.
Campagne et Escarmouche
Le mieux pour se faire les dents, ce sera la Campagne. Qui aurait aussi bien pu s’appeler Didacticiel : le scenario est superfétatoire (une histoire de ville à explorer qui n’a à peu près aucun impact sur votre partie) et en difficulté Normale le jeu ne vous met pas vraiment la pression. Sans grandes qualités stratégiques, juste à la va-comme-je-te-pousse, ça marche bien aussi.
Le mode Escarmouche offre un minimum d’options paramétrables : le nombre de concurrents et la carte, au nombre de trois au début du jeu mais elles ne se différencient pas fondamentalement les unes des autres (vous en débloquerez après chaque victoire contre chaque faction). Le mode normal est toujours très normal et grosso modo, c’est comme la campagne, le « scenario » en moins.
Dans les deux cas, comptez entre 4 et 6 heures pour boucler une partie.
Le gameplay
Bon, entrons dans le dur. Là comme ça, j’ai peur de vous avoir dissuadés de jouer à Punk Wars, alors qu’en vrai, non, ça mérite franchement d’être joué malgré les limites de l’expérience proposée. Oui, y a des bugs qui bloquent le jeu (j’en ai croisés deux en 37 heures de jeu, ça vaaaa), je ne saurais que trop vous conseiller de paramétrer les sauvegardes tous les 4 tours, parce qu’un tour, ça peut être long. Oui c’est traduit avec les pieds et vous pourriez presque regretter le Prologue qui n’était qu’en anglais ou polonais. Oui, ça aurait pu être mieux dans tous les aspects du jeu, mais, eh, vous saviez courir le 100 mètres en moins de dix secondes quand vous avez appris à marcher, vous ?
Et autant le dire direct : point de vue gestion de votre ville, l’économie, tout ça, ça ne casse pas des barreaux de chaise. Pas de mécanique subtile, pas de micro-gestion velue, les différentes lignes de production se gèrent avec le coude et sont peu interdépendantes. Simple, basique.
L’interface est honnête et fait le job. Il n’y a pas un milliard de sous-menus, c’est joli, c’est simple, c’est pratique, what else ? Et puis ça fait des jolis bruits de cliquetis et de vroum-vroum (il faut bien compter quatre heures de jeu d’affilé avant d’en avoir marre).
Les commandes… deux boutons pour tout faire, c’est pas assez, bienvenue dans le royaume du misclick. Peut-être que je me fais vieille après tout… au pire vous aurez entrainé vos capacités psychomotrices.
Le jeu se base sur l’exploitation des ressources (eau, nourriture, main d’œuvre ainsi que votre « ressource unique » c’est-à-dire vapeur, pétrole, uranium ou acier) pour pouvoir construire, et de points d’action pour que chaque unité, civile ou militaire, puisse agir. Il faudra anticiper, placer judicieusement vos bâtiments (le centre d’entraînement militaire systématiquement placé en fond de carte, c’est fait expressément pour vous emmerder), améliorer, optimiser, tu connais la chanson. De ce côté-là, c’est plaisant et bien conçu, le jeu vous incite à exploiter la taille et la forme de la carte (il y a des goulets, des ravins, des montagnes) et vous vous posez de saines questions. Chaque faction possède ses propres infrastructures pour une même fonction (par exemple les Steampunk utilise un théâtre pour divertir sa populace, le Dieselpunk une piste de course de voitures etc.). Donc pas une ÉNORME variété dans les constructions, mais une recherche de personnalisation bienvenue.
Les combats sont sympas. Là aussi, comme aucun tutoriel ne vient vous expliquer les mécaniques du jeu, vous vous demandez toujours comment il fonctionne (et ça j’aime bien). Les échanges d’amabilités, à part ça, sont plutôt rudimentaires : je tire, tu tires, je riposte, j’ai quelques coups bien dévastateurs en réserve (ou pas) mais vos possibilités d’action à chaque tour sont évidemment limitées. Et si vous jouez le surnombre, ça va coincer, l’utilisation de l’espace est définitivement l’aspect le plus décisif du jeu.
Vous pourrez enfin faire évoluer votre « civilisation ». Le jeu offre un arbre technologique, légèrement différent pour chaque faction dans la mesure où elles possèdent leurs propres technologies : les Steam vont construire des dirigeables et des trains, les Diesel des mecas et des véhicules blindés et ainsi de suite. Mais toutes visent la même chose : édifier une pyramide sur les ruines fumantes de leurs ennemis, une fois la carte entièrement nettoyée. Pyramide que vous n’aurez pas vraiment le temps d’admirer vu que sa construction met fin à la partie dans la seconde, meh. Cet arbre technologique n’est pas contraignant : vous aurez le temps de tout débloquer, vous n’aurez pas l’embarras du choix, juste à décider quand choisir quoi.
Le jeu est pimenté de quelques évènements aléatoires et de rencontres dans les ruines, qui apportent un peu de lore, de références aux grands noms du post-apo… et d’humour. Ils ne sont pas franchement décisifs, ils vous mettent tout juste quelques petits cailloux dans la chaussure. Vous anticiperez difficilement leurs effets avant de faire vos choix. Ils sont en petit nombre et peuvent se répéter plusieurs fois sur une partie.
Le truc qui m’a vraiment cassé les burettes, c’est le déplacement de caméra systématique dès que vous avez fini de diriger une unité : ça zigzag d’un point à l’autre de la carte alors que vous essayez de vous concentrer sur le fight en cours dans un coin, c’est péniiiiible. D’autant qu’à chaque fin de tour, le jeu vous propose une revue complète de toutes vos unités, donc était-ce bien nécessaire ?
Bon, et puisqu’on parle de stratégies, ça vaut quoi de ce côté-là ? Le jeu vous permettra d’élaborer divers méthodes d’invasion : la force brute évidemment, mais aussi le sabotage avec vos espions, la guerre psychologique en démotivant les troupes ou en débauchant les unités ennemies et même la ruse en attirant une faction vers une autre pour les regarder tranquillement se taper dessus. Ces mécaniques ne sont pas complètement abouties (vos explorateurs et vos espions se font un peu trop facilement dessoudés et l’IA est un peu plus maline que vous) mais c’est marrant d’essayer de les mettre en œuvre. A part ça, c’était plutôt peinard, je n’ai jamais été sérieusement menacée sur mon territoire, mais y a sûrement moyen de modifier ça avec le mode de difficulté et la taille de la carte !
Astuces
Quelques conseils si vous débutez (sinon vous n’apprendrez rien, ce gameplay m’a l’air tout à fait basique) :
- les ressources, par ordre d’importance : l’eau et la nourriture dans un premier temps, puis la ressource unique qui sera présente en petites quantités.
- faites rapidement évoluer vos tours de guet pour agrandir votre territoire, les rendre offensives et augmenter votre capacité de main d’œuvre.
- faire évoluer un bâtiment producteur de ressources ou en construire un autre, c’est kif-kif et comme ce n’est pas la place qui manque… Seuls les bâtiments producteurs de la ressource unique doivent impérativement être améliorés puisque les points de production sont limités. C’est totalement facultatif pour les autres types de bâtiments.
- ne faites pas de pâtés humains devant les goulets du terrain, laisser respirer vos unités en alternant celles qui volent et celles qui sont à pied : rangée de fantassins, quelques medics au milieu, rangée de snipers.
- mettez en sommeil les unités dont vous n’avez plus besoin dans l’immédiat, sinon la fin de tour va être relou.
- visez les tours de guet ! Elles sont difficiles à abattre mais quand elles tombent les hexagones voisins aussi.
- surveillez votre jauge de main d’œuvre : si vous atteignez sa limite, vous ne pourrez plus embaucher et serez condamné à sacrifier une de vos troupes.
Visuel
C’est parfaitement subjectif mais j’ai trouvé ça plutôt joli : les bâtiments sont classes et le niveau de zoom permet d’en profiter. Par contre leur aspect ne change pas quand vous les améliorez (il y a tout juste un petit fanion pour vous le signaler). De même certaines unités se distinguent difficilement les unes des autres et surtout du terrain : les unités mobiles sont de la même taille que les bâtiments et se confondent avec eux tandis que les couleurs du jeu sont toutes un peu neutres, avec des nuances d’ocre et de sable qui rendent le visuel un peu confus. Les différences entre deux cartes sont vraiment minimes, le jeu manque un peu de variété de ce côté-là.
Graphiquement, ce n’est donc pas fulgurant. Vos FPS feront un peu la gueule, mais franchement, on s’en fout non ? Surtout que le jeu est stable, même avec une carte blindée de bâtiments et d’unités militaires dans tous les sens.
Sound design
D’un point de vue sonore, c’est plutôt agréable à vivre. Ça cliquète, ça wheel et ça bruitdebottes à tout va c’est assez vivant (mais un peu répétitif). La musique de fond n’est pas désagréable et donne bien l’ambiance, rien à redire.
Pour conclure
Vous l’aurez compris : Punk Wars peut mieux faire mais est tellement prometteur ! Vous vous amuserez vraiment et vous ne devriez pas vous ennuyer, surtout si vous débutez dans le jeu de stratégie au tour par tour. Les mécaniques, quoiqu’un peu obscures au début, sont plutôt simples et offrent des réflexions sans prise de tête. Il y a donc de la place pour des améliorations, qui, on l’espère, seront au rendez-vous avec un prochain opus !