[TEST] Powerwash Simulator, l’expression de vos sentiments angoissés

Bon. Ce sera l’article de la maturité, celui où je remets en cause des pans entiers de votre vie. Qu’est-ce qui ne va pas chez vous ?? Qu’est-ce qui pousse plus de 3 millions de joueurs et joueuses de Powerwash Simulator à s’adonner au nettoyage haute-pression pendant des heures, des jours et des nuits ? Vous, madame, vous n’en faites pas assez au quotidien ? Vous, monsieur, vous n’auriez pas un lave-vaisselle à vider à la place ? Vous avez besoin d’un bon psy, à mon avis. Étendez-vous sur ce divan, je m’occupe de tout.

Jeu : Powerwash Simulator Genre : simulation Studio : Futurlab Editeur : Square Enix Date de sortie : 14 juillet 2022 Plateformes : Nintendo Switch, PC,  PS4, PS5, XBox One et XBox Series Prix conseillé : 24,99 €, DLC gratuits  solo Testé sur : PC Steam
Powerwash-simulator-Première-mission
Votre première mission.

Vous vous souvenez, quand elle entrait en trombe dans la chambre que vous n’aviez pas quittée depuis deux jours, en ouvrant rideaux et fenêtres en se plaignant de l’odeur ? Ensuite elle embrayait sur l’inanité de votre occupation des dernières 48h – battre votre propre record sur Gran Turismo me semble-t-il – alors que le soleil BRILLE dehors (quel scoop) et qu’il y a TANT à faire hors de cette chambre – tondre la pelouse, laver les vitres, poser des étagères, faire vos devoirs. Elle en avait marre de vous voir perdre votre temps dans une activité TOTALEMENT improductive, dont elle soupçonnait même qu’elle puisse être responsable de la MÉDIOCRITÉ de vos notes à l’école, de l’affaissement de votre colonne vertébrale, de votre régime alimentaire MALSAIN et, très probablement, du délitement de la jeunesse de nos jours. Sans parler de toute cette VIOLENCE !

À l’époque, vous aviez dû sortir un borborygme plaintif mais aujourd’hui, vous savez : les jeux vidéo stimulent votre capacité à focaliser votre attention sur des tâches complexes, favorisent tout un tas d’activités cognitives (concentration, mémoire, résolution de problèmes, discrimination visuelle, logique) et une bonne coordination œil-main (source). Ils diminuent l’anxiété, la dépression et peuvent venir en aide aux victimes de chocs traumatiques (source). Et non, ils ne rendent pas violents (source). Désolée, maman, mais le jeu fait partie de la vie de tout mammifère, c’est bon pour ellui.

C’est pour ça, d’ailleurs, que vous n’avez jamais cessé de jouer. Alors, oui, c’est vrai, il faut le reconnaitre, vous fuyez parfois la réalité en lançant une partie de Far Cry. Mais est-ce que votre occupation est moins productive que la lecture d’un roman de SF ? Est-ce qu’elle est moins noble que le visionnage d’un film au ciné du coin ? Est-ce qu’elle est moins instructive que la résolution d’une grille de mots-croisés ? Cherchez pas, la réponse est non. Le jeu vidéo est un média, un loisir et une forme d’art qui n’a à rougir devant aucune autre.

Cela dit, je paierais cher pour voir la tête de votre mère quand vous oserez enfin lui avouer qu’hier, vous avez passé trois heures à nettoyer consciencieusement les dalles d’un jardin imaginaire.

FAISONS LA PART DES CHOSES

Parce que… tout de même… Pourquoi passer une heure à nettoyer cette camionnette virtuelle alors que ta voiture, celle qui est réelle, est dégueulasse ?

Franchement ? La réponse est dans la question. C’est moins fatiguant, la facture d’eau inexistante, le travail mieux fait, les buses de votre nettoyeur haute-pression ne se bouchent jamais et le sol du garage reste sec. Oui, votre vraie voiture sera toujours sale après ça, mais votre humeur sera meilleure, vous n’aurez pas mal au dos. Mieux : vous ressentirez exactement le même plaisir, celui du travail bien fait, celui d’avoir mis un peu d’ordre dans ce monde atroce, que si vous aviez nettoyé votre Scénic.

Powerwash Simulator, disons les termes, dilue vos angoisses, rince vos soucis, fait mousser la dopamine dans votre lobe pré-frontal, et, tandis que vous balayez d’un geste ample la surface crasseuse de cette façade malpropre, vous laissez apparaitre le brillant, le lustré, le clinquant d’un décor ordonné, rassurant et stable. C’est mécanique, répétitif, la performance est immédiate et évidente. Ce n’est pas un peu propre, c’est totalement clean de chez clean, avec une progression en pourcentages qui ne peut pas mentir : vous avez atteint les 100%. Qui peut en dire autant ? Enfin, vous avez droit à la perfection, à l’absolu.

PLONGEONS DANS VOS SOUVENIRS

Certes, vous pouvez briquer ce qui ressemble fort à votre propre pavillon, redonner l’allure du neuf aux coussins de votre balancelle (ce qui n’a aucune chance d’arriver aux coussins de vos véritables meubles de jardin, déshonorés par la pluie, le temps et les doigts dégoûtants de votre petit neveu), mais vous pourriez aussi… je sais pas… lancer les DLC gratuitement ajoutés à votre jeu de base pour astiquer votre Hardy-Daytona, la moto aux airs de Harley qui a sauvé vos miches lors de votre fuite du siège de la Shinra Electric Power Company, dans Final Fantasy VII ? Sinon, vous pouvez chasser la rouille et l’oubli qui menace le terrible Scorpion Gardien (il est inoffensif promis) ou encore revivre les rires, les chants, les joies et les peines qui peuplaient, jadis, le bar du Septième Ciel, qui servait de QG aux dissidents d’Avalanche. Oui, vous êtes à Midgar, pas dans votre salon qui aurait bien besoin d’un coup d’aspirateur.

Ou peut-être préfèreriez-vous prendre un peu (beaucoup) de votre temps pour rendre au manoir des Croft son prestige perdu ? Vérifier que le frigo dans lequel vous avez enfermé Winston, votre majordome, est bien désinfecté ? Parcourir à nouveau votre terrain d’entrainement, mais cette fois avec une échelle et sans vous soucier de maitriser vos techniques de saut ? C’est dix fois plus grand que chez vous, pourtant la tâche ne vous fait pas peur.

Avec le Midgar Special Pack et le Tomb Raider Content Pack, Powerwash Simulator vous fait dépoussiérer de vieux souvenirs…

LE PIÈGE SE REFERME

Ce jeu abuse de vous, il profite de vos fragilités. Il table sur votre tendance à la procrastination et votre besoin de consolation impossible à rassasier. Il sait qu’il n’y a rien de plus chiant au monde que nettoyer un plafond avec poutres apparentes, mais il vous en rend capable ! Et il vous donne tout un tas d’outils pour cela, même si, on ne va pas se mentir, le rapport coût/bénéfice du savon est négatif et que l’embout vert vous servira à tout. Les contrôles et possibilités de déplacements de votre personnage sont satisfaisants, sans plus, mais peu importe, ce qui vous apportera de la joie aujourd’hui, c’est cette vue en première personne de vos mains gantées de caoutchouc qui nettoient ce qui est sale, rendent des couleurs au monde et du sens à l’univers, car vous en avez besoin.

Powerwash Simulator : le parcours d'obstacles de Lara Croft.
Oh non, nonononononnonononon

Il y a quelques défis sympas à relever dans les succès du jeu, des nains de jardin à trouver à travers les niveaux et même un genre d’histoire en background (avec un chat), mais ce n’est clairement pas son scenario de simulation d’auto-entreprenariat qui vous retiendra, mais bien son gameplay répétitif et addictif.

Vous y allez avec méthode, concentration. Dès qu’une mission est finie, vous investissez dans du nouveau matériel, plus performant, qui vous permettra d’atteindre les recoins les plus sombres, les plus crapoteux du niveau suivant. Arrivés sur place, certain·es commenceront par les plus grandes surfaces, d’autres prioriseront les items les plus retors, d’autres refusent en bloc l’usage de l’échelle et préfèrent sauter pendant 10 minutes pour atteindre les recoins les plus en hauteur, chacun·e son style.

C’est aussi un travail d’équipe, le jeu étant crossplay… plus ou moins : les joueureuses PC pourront ainsi s’allier aux utilisateurices de la Xbox, les joueurs et joueuses PlayStation restant sur la touche (amusez-vous entre vous, je sais pas, trouvez des solutions).

Powerwash Simulator est simple à prendre en main, le but limpide, les moyens d’y parvenir sont là, dans votre inventaire. Vous ne pouvez pas « rater » une mission : elle ne se terminera pas en deçà des 100%, vous ne pourrez pas passer à côté de la moindre trace de crasse, vous avez même la liste exhaustive et le pourcentage d’avancement du nettoyage de chaque item, que le jeu vous mettra en surbrillance si vous n’arrivez pas à trouver la micro-souillure qui fait encore défaut. Vous ne pouvez pas échouer.

VOILA, ÇA FERA 24,99 EUROS

J’ai fait ce que j’ai pu pour valider votre soif de Powerwash, maintenant, je vais vous faire une confidence : rien ne me donne plus envie de faire autre chose que ce jeu. Je le déteste PERSONNELLEMENT. Quand un niveau commence, j’ai envie de hurler et je rage après chaque recoin qui ne veut pas se laisser récurer. Mais quel genre d’esprit pervers a pu mettre au monde une telle monstruosité ?? Il te crache à la gueule un « tiens, c’est très grand, c’est absolument dégueulasse, tu en as pour 5h, bon courage ». Ce jeu ne m’amuse pas et pourtant, POURTANT, j’ai ressenti dans ma chair le BESOIN de finir de briquer ce foutu balcon, cette maudite porte, ce juke-box ignoble.

Son aspect ludique m’échappe totalement, je trouve ses graphismes chouïa agressif pour mes rétines et le bruit du jet d’eau en continu me rend dingue, mais il parvient à solliciter avec un vice éhonté une petite parcelle de moi qui n’aime pas les taches, un truc dans mon cerveau reptilien qui devait, j’imagine, servir à nos ancêtres les homininés, mais franchement, je ne sais pas à quoi. Finir un truc commencé, réparé un truc cassé, faire briller un truc terne, juste un besoin d’ordre pour soulager son esprit angoissé par le chaos qui l’entourait ? Et pour ça, vraiment, je le déteste, mais rien ne me rend plus en joie que le fait que vous, il vous rende heureu·se.

Gameplay
6
Graphismes et DA
5
Durée de vie et rejouabilité
7
Musiques et sound design
4
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"Satisfaisant"
C'était sale et après c'est propre.
Des heures et des heures et des heures de jeu en perspective.
Des DLC gratuits.
C'est cheum, quand même.
Le bruit de l'eau, j'en peux plus.
Ne remplace pas vraiment un bon psy.
5.5